mercredi 30 octobre 2013

Le Cœur des hommes 3

« Le Cœur des hommes 3 » est, comme son nom l’indique, le troisième volet de la saga « Cœur des hommes », initiée en 2003 par Marc Esposito, ex-journaliste ciné converti réalisateur. Face caméra, aucun changement … ou presque, puisque Gérard Darmon, en froid avec Marc Esposito pour d’obscures raisons, n’a pas souhaité faire partie de l’aventure.
Synopsis Allociné : Alex, Antoine et Manu rencontrent Jean, un solitaire, qui ignore les plaisirs de l’amitié. Peu à peu, ils apprennent à se connaître, à s’apprécier. Jean est touché par la complicité et l’affection qui nourrit leur relation, il découvre le bonheur d’être ensemble. Quand leurs aventures sentimentales et les épreuves de la vie les bousculent, ils se regroupent pour les partager, pour se tenir chaud. De confidences en éclats de rires, le trio redevient un quatuor.
Marc Esposito revient avec sa bande de copains, incarnée par un quatuor charmeur et toujours aussi charismatique, mais le bilan demeure, malgré tout, mitigé. « Le Cœur des hommes 3 » alterne, en effet, des séquences franchement consternantes, provoquant limite le malaise (les scènes avec le gamin de Marc Lavoine, les discussions misogynes ou les répliques pataudes sur les poils pubiens) avec des moments nettement plus réussis (le black-jack au casino, le banquet chez Jean-Pierre Darroussin, les scènes d’Elmosnino).
On retrouve la fibre nostalgique Yves Robert (« Un éléphant, ça trompe énormément ») / Lawrence Kasdan (« Les Copains d’abord ») dans l’écriture, mais le bât blesse lorsque Esposito se contente de recycler les vannes des précédents (disputes conjugales, adultères, Lavoine qui batifole, Campan séducteur, les 4 compères qui se retrouvent à Cabourg sans les femmes, ni les enfants pour faire le point, ou parce que l’un d’eux veut parler aux autres d’un sujet qui lui tient à cœur. …). Finalement, le sentiment un peu amer d’une réunion forcée dans l'optique indigeste d'un troisième opus.
De même, difficile de se satisfaire d’une telle nonchalance dans la mise en scène (caméra statique, choix musicaux douteux articulés autour de tubes pop, montage brouillon, longueurs interminables …) ou de l’exhibitionnisme – relatif – d’Esposito (sa brouille avec Darmon intégrée au scénario).
En deux mots : Cruelle déception pour ce « Cœur des hommes 3 », qui repose essentiellement sur les acquis (des blagues sexistes pas folichonnes) sans se renouveler. 100 % vulgarité, 0% originalité.
Anecdote Allociné : Le cinéaste Marc Esposito, fan d’Adele, souhaitait qu’elle fasse partie de la bande-originale du film. Seulement, le temps que le projet se monte, la diva est devenue une star de renommée internationale, et l’argent nécessaire à l’achat des droits dépassait amplement le budget réservé à la musique.
La Bande Annonce du film Le Coeur des hommes 3:
 
 
NOTE: 4/10
 

lundi 28 octobre 2013

Malavita

Il l’avait promis : « Arthur et les Minimoys », son dixième long métrage, devait être son dernier en qualité de réalisateur. Pourtant, sept ans plus tard, le constat est foudroyant : Luc Besson n’en finit plus d’accumuler les navets dans son CV. « Arthur et les Minimoys 2 & 3 », « Adèle Blanc-Sec », « The Lady » et aujourd’hui « Malavita » sonnent le glas d’un homme aux débuts pourtant prometteurs, hélas devenu, à l’aube des années 2000, un producteur sans scrupule, cynique, et surtout peu exigeant.
Après le consternant biopic « The Lady », « Malavita », pastiche de films mafieux en salles depuis le mercredi 23 octobre, confirme donc que Luc Besson n’a plus rien de l’enfant visionnaire de ses débuts – l’atomique « Nikita », l’entraînant « Grand bleu », le tonitruant « Léon » et le divertissement survitaminé « Le Cinquième élément » n’étaient pas des chefs d’œuvre mais avaient au moins le mérite de marquer le cinéma de leur empreinte générationnelle, leur esthétique publicitaire, ainsi que leur ambition de démesure – et s’inscrit dans la continuité d’une filmographie discordante depuis le malencontreux « Angel-A ». Autrement dit, des « produits » dénués d'âme et réalisés dans l’unique but d’amasser plusieurs millions sur le dos d’un public égaré.
Synopsis Allociné : Fred Blake, alias Giovanni Manzoni, repenti de la mafia new-yorkaise sous protection du FBI, s’installe avec sa famille dans un petit village de Normandie. Malgré d’inconstestables efforts d’intégration, les bonnes vieilles habitudes vont vide reprendre le dessus quand il s’agira de régler les petits soucis du quotidien ...
« Malavita », adaptation du roman éponyme de Tonino Benacquista, est le prototype du film fade, linéaire, insignifiant, sans surprise, sans enjeu et réalisé sans désir.
 
Le choc des cultures – une famille d’Américains débarque en Normandie et se retrouve confrontés à l’incompréhension de la population locale – ne prend à aucun moment. Pire, le spectacle est pourvu d’un esprit anti-français malvenu, usant de stéréotypes grotesques et n’évitant aucun écueil (les Américains mangent des hamburgers et du beurre de cacahuète, les Français du camembert).
 
Que dire du reste du scénario ? A peine plus distrayant que celui d’une piteuse production Besson justement ! Soit, un membre de la mafia new-yorkaise qui, accompagné de sa famille, intègre un programme de protection des témoins du FBI après avoir balancé ses ex-compères. Pas très bandant tout ça.
Et si « Malavita » s’articule malgré tout autour de quelques scènes sympatoches (celle par exemple durant laquelle Dianna Agron  frappe des garçons prêts à abuser d’elle à coups de raquette de tennis), Luc Besson ressent le besoin étrange de s'autotorpiller dans les cinq minutes qui suivent via des séquences prétentieuses et maladroites pendant lesquelles les acteurs – une distribution pourtant en or – s’amusent bêtement à rejouer les rôles (cultes), des rôles qui les ont révélés jadis au public, le tout donnant lieu à une sorte de parodie involontaire.
En tête, celle où Robert DeNiro assiste à une projection des « Affranchis » dans le cadre d’un ciné-club, puis balance quelques vannes pompeuses et vieillottes – façon « RED » – sur le banditisme. Ou encore celle où Michelle Pfeiffer – présente au générique de « Scarface » rappelons-le – fait exploser un commerce sous prétexte de racisme à son encontre.
 
Quant à la signature « Martin Scorsese » au poste de producteur exécutif, c’est tout de même à se demander s’il a lu le roman ou le scénario de cette adaptation lourdosse.
Bilan affligeant pour le dernier Luc Besson, « Malavita », une comédie noire hyper-violente dispensable, et surtout rongée par une totale absence d’ambition artistique.
 
Anecdote (Source : Allociné) Dianna Agron et John D’Leo, qui incarnent les enfants Blake, Belle et Warren, sont arrivés en Normandie deux semaines avant les autres acteurs. Ils se sont rencontrés au moment des essais maquillage. Dianna Agron revient sur une anecdote amusante concernant leurs premiers échanges : « Je me suis approchée de lui et je lui ai fait la bise. On s’est mis à discuter jusqu’à ce qu’il me demande : « Et toi, tu fais quoi sur ce film ? La coiffure ? Le maquillage ? » Je lui ai répondu : «  Je suis ta sœur ! » Il a rougi jusqu’aux oreilles et c’est devenu un sujet de blagues entre nous. »
 
La Bande Annonce de Malavita:
 
 
NOTE: 2/10

vendredi 25 octobre 2013

Au bonheur des ogres

« Au bonheur des ogres » est l’adaptation cinoche du roman éponyme fantaisiste de Daniel Pennac, paru en 1985. Le film est réalisé par Nicolas Bary et bénéficie d’un casting 4 étoiles, réunissant le très prolifique Raphaël Personnaz (rien que cette année : « La Stratégie de la poussette », « Marius », « Fanny » et bientôt « Quai d’Orsay »), la charmante Bérénice Bejo, le cinéaste serbe Emir Kusturica, la jeune première Mélanie Bernier et le nouvellement Césarisé Guillaume de Tonquédec.
Synopsis Allociné : Dans la tribu Malaussène, il y a quelque chose de curieux, de louche, d’anormal même diraient certains. Mais à y regarder de près, c’est le bonheur qui règne dans cette famille joyeusement bordélique dont la mère sans cesse en cavale amoureuse a éparpillé les pères de ses enfants. Pour Benjamine Malaussène, bouc émissaire professionnel et frère aîné responsable de cette marmaille, la vie n’est jamais ennuyeuse. Mais quand les incidents surviennent partout où il passe, attirant les regards soupçonneux de la police et de ses collègues de travail, il devient rapidement vital pour le héros de trouver pourquoi, comment, et surtout qui pourrait bien lui en vouloir à ce point-là ? Benjamin Malaussène va devoir mener sa propre enquête aux côtés d’une journaliste intrépide surnommée Tante Julia pour trouver des réponses.
 
Si le ton loufoque, l’énergie employée et l’humour décalé font parfois relativement mouche, le reste est nettement plus déconcertant. Au premier plan, le gros plantage de l’esthétique rose bonbon kitsch, flashy et surtout ratée. Une véritable surcharge visuelle et paradoxalement une grande peine pour identifier la période durant laquelle l’action prend place : volontaire ? Involontaire ? On ne sait pas vraiment. Quelques idées lorgnant sur l’univers de Jeunet à sauver malgré tout (les jouets explosifs, 2-3 trouvailles de mise en scène …).
Que dire du scénario ? L’intrigue basique – une enquête pour démasquer un suspect d’attentats à la bombe exécutés dans un grand magasin – mêle un peu tous les genres (comédie, romance, polar …) avec panache – on peut se réjouir au passage du fait que Nicolas Bary ne dénature point la prose issue du matériel littéraire de départ, ce qui en soi est déjà pas mal – mais sans vraiment laisser de place aux personnages. Ainsi, même si Raphaël Personnaz & Bérénice Bejo forment un joli couple, leur relation reste indubitablement lisse et sans enjeu. De même, on se fiche un peu de la tripotée de bambins à l’écoute des histoires de leur frère, ou de l’ami au passé trouble incarné par Kusturica.
Bilan : Une adaptation fidèle du roman de Pennac (le charme foutraque, les vers tordants …) et relativement inspirée (Burton, Jeunet, Yann Samuell …), mais qui manque cruellement d’intensité dramatique et de profondeur. Casting hétérogène.
Anecdote : Le roman « Au bonheur des ogres » est le premier tome de la saga de la famille Malaussène, qui comprend en tout 6 romans, dont un – La Fée Carabine – qui a déjà été transposé en images, un téléfilm pour être exact qui date de 1988, scénarisé par l’auteur, Daniel Pennac, et réalisé par Yves Boisset. Tom Novembre y incarnait le rôle de Benjamin Malaussène aux côtés notamment de Fabrice Luchini 
 
La Bande Annonce d'Au bonheur des ogres:
 
 
 
NOTE: 4,5/10

jeudi 24 octobre 2013

Thor : Le Monde des ténèbres

Depuis que Marvel a enclenché la phase 2 de son univers cinématographique partagé, certaines mesures qualitatives ont été prises. « Iron Man 3 » gommait les défauts gênants de son prédécesseur en s’articulant véritablement autour de la figure incarnée par Robert Downey Jr. En résultait un film plus humain, plus réaliste, plus intéressant et de bien meilleure qualité. Certains criaient au « spectacle à tout prix » qui cannibalisait la patte artistique Shane Black, tandis que d'autres étaient au contraire beaucoup plus tempérés en louant l'apposition de la griffe du célèbre scénariste / réalisateur.

Pour « Thor : Le Monde des ténèbres », Marvel semble avoir appris par cœur la leçon « The Avengers » sur le plan du spectacle et de l'entertainment. Sans pour autant atteindre le niveau du cross-over épique qui nous a tant séduit l’an dernier, « Thor 2 » assure l'essentiel : un divertissement assuré de bout en bout ! Ce qui n’était pas le cas du premier opus, franchement dispensable il faut l'avouer. Le constat est quelque peu surprenant dans la mesure où l’on s'attendait à largement pire suite aux déboires qu’a connu la production : différents artistiques avec la première réalisatrice affiliée au projet (Patty Jenkins, CQFD) et licenciement de cette dernière, tension grandissante entre le compositeur Carter Burwell, le réalisateur Alan Taylor et le boss Marvel Kevin Feige, scénario retouché par le script doctor Joss Whedon, rumeur persistante selon laquelle Alan Taylor aurait été évincé de la salle de montage et des retakes, eux-mêmes réalisés à deux mois de la sortie, discordances sur la durée du long métrage …
Synopsis Allociné : « Thor : Le Monde des ténèbres » nous entraîne dans les nouvelles aventures de Thor, le puissant Avenger, qui lutte pour sauver la Terre et les neufs mondes d'un mystérieux ennemi qui convoite l'univers tout entier. Thor se bat pour restaurer l’ordre dans le cosmos, mais une ancienne race, sous la conduite du terrible Malekith, un être assoiffé de vengeance, revient pour répandre les ténèbres. Confronté à un ennemi que même Odin et Asgard ne peuvent contrer, Thor doit s’engager dans son aventure la plus dangereuse et la plus personnelle, au cours de laquelle il va devoir s’allier au traître Loki pour sauver non seulement son peuple et ceux qui lui sont chers, mais aussi l’univers lui-même.
Au même titre qu’« Iron Man 3 », le film prend place après « The Avengers ». Tous les personnages de l’opus précédent sont à nouveau réunis pour faire face à une menace maléfique. Le scénario ne fait pas dans la dentelle ni dans l'originalité et c’est probablement là le plus gros souci. Si l’écriture ne souffre d'aucune incohérence majeure quant au déroulement de l'intrigue, les facilités scénaristiques sont cependant légion pour que l’histoire puisse suivre son cours. Le constat est similaire en ce qui concerne la caractérisation des protagonistes, relativement sommaire. Jane Foster (Natalie Portman) reste cantonnée au rôle de potiche faire-valoir et sans défense, même si sa présence entraîne davantage de dramaturgies in finale. Les deux grosses déceptions proviennent de Loki – méchant mémorable de « The Avengers » – hélas trop peu présent dans cette aventure, malgré l'incroyable talent de Tom Hiddleston qui méritait sans doute mieux, et surtout de Malekith, le bad guy interprété par un Christopher Eccleston bien fade, n'apportant que très peu de saveur et de prestance à son personnage. Paradoxalement, ce sont quelques rôles secondaires (Jaimie Alexander, Zachary Levi, Idris Elba …) qui sortent du lot et bénéficient d’un traitement plus soigné, même s’ils auraient certainement gagné à être également plus étoffés (notamment dans les relations qu'ils entretiennent entre eux). La prestation de Kat Dennings, hilarante, est à retenir et prouve à elle seule que Marvel sait y faire pour doser l’humour. Comique de situations et de gestes, punchlines tordantes … les acteurs tout comme la mise en scène parviennent sans mal à nous faire souffler et sourire entre deux scènes d’action.
La mise en scène justement, parlons-en. Alan Taylor met son talent issu de la série à succès « Game of Thrones » (dont il a signé plusieurs épisodes) à profit d’un cadrage fluide et respectueux des codes esthétiques mis en place par Kenneth Branagh dans le premier film : le royaume d’Asgard jouit d’une plastique toujours aussi sophistiquée. Les nouveautés liées aux super pouvoirs et aux équipements de haute technologie offrent une valeur ajoutée non négligeable et un spectacle encore plus attrayant. Taylor apparaît également assez à l’aise avec l’action, notamment dans le final épique en plein cœur de Londres qui n’est pas sans rappeler le climax à New York de « The Avengers ». On ne s'ennuie pas ou peu jusqu'à l'épilogue, malheureusement assez quelconque, mais largement rattrapé par une scène post-générique excitante qui n'augure que du bon pour la suite des aventures Marvel sur grand écran.
Au final, malgré des défauts certainement imputables au development hell (on devine aisément le montage à la hache), « Thor : Le Monde des ténèbres » est une suite efficace et satisfaisante, qui remplit le cahier des charges en garantissant son contrat premier : divertir.

Anecdote Allociné : La comédienne Jaimie Alexander, qui incarne Sif dans « Thor : Le Monde des ténèbres », s'est blessée lors du tournage du film à Londres en septembre 2012. Celle-ci a tenu à rassurer ses fans via son compte Twitter en postant plusieurs messages : « Aujourd'hui, je me suis salement blessée sur le tournage […] J'ai de la chance de ne pas être paralysée. Merci de tout cœur à ceux qui se sont occupés de moi […] Je commence à me remettre et je recommencerai à botter des culs en tant que Sif dans très peu de temps ! »
 
La Bande Annonce de Thor : Le Monde des ténèbres:


NOTE: 6/10

Le compte-rendu de la conférence de presse du film:

Sur la façon dont Marvel a évolué, Kevin Feige se remémore le passé : "Il était impossible de changer quoi que ce soit sur les premiers films réalisés : « X-Men » et « Spider-Man ». Avec « Iron Man », j'ai obtenu mon propre studio, plus de libertés et ainsi la possibilité de produire plusieurs films de super-héros. Avec « Thor : Le Monde des ténèbres », j'ai voulu répliquer le plaisir des lecteurs de comics et amener un nouveau public susceptible d'apprécier le monde des super-héros."

Tom Hiddleston s'est éclaté sur le tournage. Il a adoré interpréter le rôle de Loki, un personnage qu'il caractérise comme complètement dingue : "Thor est le dieu du tonnerre et Loki est le malicieux, donc mon job était de m'amuser." Chaque réalisateur avait une idée spécifique quant à son personnage et chacun a su montrer son charme, son goût pour la provocation mais aussi sa vulnérabilité et ses failles émotionnelles (la colère, la peur...). Ces nombreuses facettes ont rendu le personnage intéressant à jouer pour lui.
Natalie Portman s'est réjouie de travailler à nouveau avec la même équipe à laquelle Alan Taylor a apportée son énergie. Elle ne tarit pas d'éloges sur Chris Hemsworth : "Il est sans défauts : intelligent, drôle, généreux, talentueux, c'est un amour. Surtout comparé à Tom (rires)".
Alan Taylor était quelque peu effrayé à l'idée de travailler avec Anthony Hopkins : "Sa réputation est merveilleuse. Il dit dans son rôle dans « Elephant Man » "Suis-je un homme bon ou un homme mauvais ?". Cette phrase toute simple était si énorme que l'idée de travailler avec celui qui l'avait prononcée m'intimidait énormément." Fort heureusement, les peurs du réalisateur se sont évaporées lors du premier déjeuner avec l'acteur : "Anthony était extrêmement généreux et nous faisait rire sur le tournage. Je le considère comme un immense acteur, le plus grand de sa génération."

Natalie Portman s'est exprimée quant à l'évolution des personnages féminins au sein de l'univers Marvel. Pour elle, ce monde de super-héros montre des femmes identiques aux hommes : "Chacun a des qualités et des défauts. Les deux peuvent être vulnérables, drôles, passionnés. C'est le cas de mon personnage. J'estime que c'est une manière d'aborder la parité sans pour autant dire "Regardez, ce film est féministe !". Toutes les femmes du film, interprétées par Jaimie (Alexander), Kat (Dennings) et Rene (Russo), restent fortes et ont leur personnalité et je pense que c'est important de le montrer.
Tom Hiddleston a été questionné quant aux motivations de son personnage : "Que veut mon personnage au final ? Il ne le sait plus lui même à vrai dire. Fût un temps où il voulait simplement être aimé de ses parents et devenir roi. Mais dans sa nature, il préfère jouer que gagner. Nous verrons à l'avenir s'il est près ou non de ce qu'il considère comme une victoire."

Sur l'atmosphère plus ténébreuse qui a été apportée à cet épisode tout en préservant un certain côté humoristique, Alan Taylor répond qu'il faut mettre la barre plus haut à chaque fois : "On essaie de se rapprocher du public. Ici, on s'est dit qu'on irait dans un univers plus sombre, plus cru et plus réaliste. En même temps, l'humour se devait d'être présent pour garder un certain équilibre. Cette alchimie réussit, c'est le moyen de nous relier au public."
Pour conclure, Natalie Portman a donné son avis sur les gifles qu'elle donne à Thor et Loki durant le film : "C'était très agréable de les gifler. Pour Thor, c'était une gifle d'amour mais aussi de solidarité pour toutes mes sœurs abandonnées qui ne revoient jamais leur bien aimé. Pour Loki, c'était une gifle de vengeance pour tous les new-yorkais !
 
Article rédigé par Guillaume Seel

mercredi 23 octobre 2013

Blood Ties

Après avoir séduit l’hexagone grâce au triomphe « Les petits mouchoirs », Guillaume Canet a traversé l’Atlantique pour vivre le rêve américain en tournant en langue anglaise « Blood Ties », un remake des « Liens du sang » – polar bancal dans lequel il tenait le haut de l’affiche aux côtés de son copain François Cluzet – co-écrit avec le glorieux James Gray, qui a participé pendant trois semaines à l’élaboration du scénario. Mais Guillaume Canet n'est pas parti la fleur au fusil dans l’aventure, le comédien – réalisateur français a, en effet, rameuté sa fidèle équipe : ses producteurs Alain Attal et Vincent Maraval, président de la société Wild Bunch, le directeur de la photographie Christophe Offenstein, le monteur Hervé De Luze, son pote Maxim Nucci alias Yodelice à la musique, ainsi que sa compagne à la ville, l’actrice Marion Cotillard. A noter que « Blood Ties » a reçu un accueil critique plutôt tiède à Cannes lors de son passage hors sélection officielle.
Synopsis Allociné : New York, 1974. Chris, la cinquantaine est libéré pour bonne conduite après plusieurs années de prison pour un règlement de compte meurtrier. Devant la prison, Frank, son jeune frère, un flic prometteur, est là à contrecœur. Ce ne sont pas seulement des choix de « carrières » qui ont séparé Chris et Frank, mais bien des choix de vies et une rivalité depuis l’enfance. Leur père Léon, qui les a élevés seul, a toujours eu pour Chris une préférence affichée, malgré les casses, la prison … Pourtant, Frank espère que son frère a changé et veut lui donner sa chance : il le loge, lui trouve un travail, l’aide à renouer avec ses enfants et son ex-femme, Monica. Malgré ces tentatives, Chris est vite rattrapé par son passé et replonge. Pour Frank, c’est la dernière des trahisons, il ne fera plus rien pour Chris. Mais c’est déjà trop tard et le destin des deux frères restera lié à jamais.
« Blood Ties » est un polar honnête, ultra-référencé – des influences 70’s frappantes avec en tête les œuvres de William Friedkin, John Cassavetes et Francis Ford Coppola – et plutôt efficace, disons de bonne facture, mais qui manque un peu de mordant pour nous emporter totalement.
Ça part plutôt pas mal, avec une histoire simple, mais efficace & solide de frangins que tout oppose – l’un est un flic prometteur tendance psychorigide, l’autre a beau être un délinquant, un taulard en liberté conditionnelle, il n’en demeure pas moins le petit chouchou du père. On reconnaît bien dans cette tragédie familiale, ce drame cornélien à la belle épaisseur humaine, la plume de James Gray – toute ressemblance avec les personnages de « La Nuit nous appartient » n’est purement pas fortuite.
Quant à la mise en scène de Canet, elle ne révolutionne certes pas le genre, mais mêle généreusement classicisme – joli travail de reconstitution des 70’s (costumes, moustaches & Cadillac) – réalisme (un suspense qui tient en haleine jusqu’au bout), et exacerbation formelle. Une photographie sublime et granuleuse, ainsi qu'une BO aux petits oignons complémentent l'hommage aux œuvres des 70's. Nous sommes également agréablement surpris du système de narration qui, sur un flux tendu, observe avec subtilité la notion de choix, notamment dans la visée manichéenne pour chacun des personnages principaux.
Ce qui déçoit, c’est peut être l'étonnante avarice en moments mémorables. Quand James Gray surprenait tout le monde dans « La Nuit nous appartient » avec une séquence spectaculaire de course-poursuite filmée en caméra embarquée, ou quand Michael Mann distillait des scènes de fusillades d’anthologie dans sa « trilogie numérique » (« Collateral », « Public Enemies », « Miami Vice »), Canet, lui, néglige un peu la nécessité de « morceaux choisis » pour transcender le genre et apposer sa griffe artistique. Dommage !  
Autre défaut préjudiciable : la caractérisation des personnages, relativement inégale. La sœur incarnée par Lili Taylor est laissée-pour-compte, et de manière plus générale, il en est de même pour presque tous les protagonistes féminins (hormis Marion Cotillard) ; les gangsters ont des gueules (Matthias Schoenaerts, Domenick Lombardozzi) mais demeurent hélas inexploités, et Clive Owen affiche sa frimousse de chien battu quant on attendrait un regard menaçant. Billy Crudup s’en tire par contre avec les honneurs, de même que l’excellent James Caan (un fidèle de Gray).
Bilan : Pour sa première expérience au pays de l’Oncle Sam, Guillaume Canet réalisateur signe un polar soigné, réalisé avec sincérité et truffé de références, mais qui ne fera sans doute pas date dans l’histoire du cinéma, notamment à cause de quelques maladresses désarmantes.

 
Entretien avec Mr Canet à l’occasion de l’avant-première du film, en province :
 
Avant toute chose, je tiens à préciser que ma batterie de téléphone ayant lâché en fin d’entretien (saloperie de Loi de Murphy !), je n’ai pas pu tout enregistrer et retranscrire formellement toutes les questions, il y a donc des passages qui proviennent de mes capacités de mémorisation qui ont évidemment leurs limites !!
Un spectateur : Bonsoir Mr Canet, est-ce que vous avez quelques anecdotes sur votre expérience aux USA à nous faire partager ?
Guillaume Canet : oui, toujours ! Aux Etats-Unis, il y a tout un tas de trucs complètement aberrants. Par exemple, le réalisateur n’a pas le droit de s’adresser directement aux figurants, sinon leur statut change instantanément, ils deviennent acteurs et doivent être payés en conséquence. Un figurant m’a d’ailleurs piégé un jour de cette manière en me demandant s’il pouvait s’asseoir à tel endroit. Autre anecdote : aux USA, chaque profession est bien spécifique et cela doit être scrupuleusement respecté. Par exemple, le réalisateur n’a pas le droit de toucher certains objets car c’est le travail de l’accessoiriste, et uniquement le sien. On signe de la paperasse au départ sans trop savoir ce que c’est, puis au moment du tournage, on comprend de quoi il s’agit !
Un spectateur : On sait tous ô combien cela est difficile pour un réalisateur français travaillant aux Etats-Unis de bénéficier du fameux et précieux « final cut », ou montage final. Est-ce que cela a été votre cas ? Comment s’est passée votre collaboration avec les américains ?
GC : Déjà, vous savez, même si le film a été intégralement tourné aux Etats-Unis et en langue anglaise, l’équipe technique était majoritairement française sur le plateau, et l’argent de production était principalement français, puisque c’est Alain Attal, mon producteur, qui a co-financé le projet. Je n’ai quasiment jamais eu de problèmes de ce côté-là, les américains ont toujours été très sympas avec moi. D’ailleurs, je crois que je ne pourrais jamais tourner un très gros film là-bas, comme l’ont fait par exemple Mathieu Kassovitz ou Jean-Pierre Jeunet (respectivement « Babylon A.D. » et « Alien, la résurrection », CQFD) avec des conflits énormes avec le studio. On leur a promis un film, ils se sont investis en travaillant en amont comme des malades pendant 6-12 mois, l’ont tourné avec une perspective personnelle, puis se sont fait dégagés comme des malpropres au moment du montage …  je crois que je ne pourrais pas supporter.
 
Il n’y a qu’une seule fois où j’ai eu des difficultés sur le plateau, j’avais demandé à ce qu’on apporte des Cadillac pour recréer l’ambiance du New-York des années 70, et le directeur artistique s’est pointé avec des bagnoles flambant neuves. Je lui ai répondu merci évidemment mais rétorqué que c’était impossible que des types de cette classe sociale conduisent des caisses aussi éclatantes et étincelantes à cette époque, il fallait absolument qu’elles aient l’air dégueu, vieilles et usées … totalement imprégnées de l’ambiance locale, car j'vous jure, Brooklyn dans les années 70, c’était une vraie poubelle (rires dans la salle).  
Un spectateur : Le grand metteur en scène américain James Gray est crédité en tant que scénariste. Comment l’avez vous rencontré ? Comment l’avez-vous embarqué sur le projet et enfin, comment s’est passée votre collaboration ?
GC : C’était au festival de Cannes en fait. Il était dans le jury cette année-là et j’ai eu l’occasion de dîner à sa table un soir. Nous avons discuté de tout et de rien, puis je lui ai annoncé que je préparais un remake us des « Liens du sang » qu’il avait vu & apprécié. Je lui ai demandé s’il connaissait un scénariste de polar pas trop mauvais, incollable sur la ville de New-York, et qui accepterait de bosser avec moi sur l’adaptation, ce à quoi il a répondu « ben, moi ». Sa réponse m’a énormément touché, j’ai évidemment accepté et nous avons commencé à bosser ensemble. Mais vous savez, on a travaillé seulement 3 semaines ensemble au final. C’est un type brillant, il a beaucoup apporté au film.
Un spectateur : Vous avez beaucoup privilégié votre carrière de réalisateur ces dernières années, est-ce que cela veut dire qu’on ne vous verra plus du tout sur les écrans à l’avenir ?
GC : Vous savez, à la base, j’ai toujours souhaité être metteur en scène, c’est le destin qui a choisi à ma place en m’offrant une carrière d’acteur, mais effectivement maintenant que j’arrive à réaliser des films, je préfère davantage me concentrer sur la mise en scène. Mais cela ne signifie pas pour autant que j’abandonne complètement le métier de comédien. Je m’apprête actuellement à tourner dans le dernier Stephen Frears, dont le tournage commence bientôt à Londres, enfin ma partie, puis j’attaquerais un film dans lequel je joue un tueur d’enfants, ce type de rôle est nouveau pour moi, c’est un sacré défi.
Un spectateur : Vous avez réalisé quatre films. Est-ce qu’il y a des éléments qui les relient entre eux, une sorte de connexion ?
GC : Mmmhh j’ai jamais vraiment réfléchi à ça. Ah si, y’a peut-être le thème de la mort. Il est toujours question d’une ou plusieurs personnes décédées dans mes films, me demandez pas pourquoi. Si, il y a aussi la « famille », qui est un sujet que j’aborde régulièrement parce que ça me semble important. J’ai pas vu mon frère depuis au moins 8 ans, et cela m’affecte profondément. J’ai envie de parler de l’importance de l’union au sein d’une famille et de le partager. Sinon, j’ai réalisé des films de genres différents – une comédie absurde, un thriller, un film de potes, et un polar – parce que j’ai moi-même été bercé à différents genres quand j’étais gosse, je regardais énormément de polars, de thrillers, de comédies … ceci explique sans doute cela. J’aime la diversité et me diversifier.
MOI (hiii) : Vous venez de dire à l’instant à quel point la notion de « famille » était cruciale pour vous. J’ai remarqué que vous aviez emmené quelques « copains » avec vous aux US, un peu VOTRE famille en quelque sorte, Christophe Offenstein, votre directeur de photo attitré, Hervé De Luze votre monteur, Alain Attal, votre épouse … vous vous êtes pas dit à un moment « Quitte à embarquer ma famille, autant proposer un rôle à Gilles Lellouche ? » (les deux comédiens se connaissent depuis très longtemps dans la vraie vie, sont meilleurs amis et ont régulièrement collaboré ensemble CDFD).
GC : Si si, j’aurais bien voulu, c’est un super acteur Gilles, sauf qu’il y avait un GROS GROS problème d’accent. Gilles parle extrêmement mal l’anglais, il a un accent horrible et va falloir qu’il bosse des années et des années avant que je l’embarque avec moi (rires). « Kevin is in the kitchen », ah non pardon merde « Brian is in the kitchen », putain le répétez pas à Gad (Elmaleh), il va m’en vouloir à mort s’il apprend que j’ai utilisé sa vanne en la foirant.
Un spectateur : Vous employez très souvent votre compagne (Marion Cotillard, CQFD) dans vos films, est-ce que c’est quelque chose qu’on vous a déjà reproché ?
GC : Non, jamais. Mais si c’était le cas, je crois que je répondrais à la personne « j’t’emmerde ! » (Réponse rapide et franche)
Un spectateur : Est-ce que vous avez songé à un acteur en particulier pendant le processus d’écriture en espérant pouvoir l’avoir ensuite ?
GC : Mmmhhh, pour être tout à fait sincère, NON. Clive (Owen, CQFD) est arrivé tardivement sur le projet, de même que Billy Crudup ou Mila Kunis. Y’a que Zoé (Saldana) & Marion (Cotillard) auxquelles j’ai pensées assez tôt finalement, j’ai d’ailleurs été ravi qu’elles acceptent de jouer dedans.
Un spectateur : Pour finir, parlez-nous un peu de vos projets (de réalisateur) ? Un autre film aux USA ? Est-ce que vous avez envie de collaborer à nouveau avec vos « amis » des « Petits mouchoirs » ?
GC : Pour le film aux USA, oui j’adorerais. Si on me le propose évidemment. Mais pas tout de suite car j’ai d’abord envie de retravailler en France. Je suis en train d’écrire une comédie bien déjantée en ce moment. Un film qui ressemble un peu sur la forme à mon tout premier long, « Mon Idole », un truc totalement absurde. Et pour répondre à votre dernière question, François Cluzet jouera probablement dedans.
Guillaume Canet a également évoqué au cours de cet entretien les conséquences du succès des « Petits mouchoirs », qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Il avoue avoir été profondément affecté par l’accueil critique glacial de « Blood Ties » à Cannes.  
 

lundi 21 octobre 2013

Le Vent se lève, il faut tenter de vivre

11 films, 11 chefs-d’œuvre ! Grand défenseur de la nature et de l’écologie, Hayao Miyazaki s’est imposé au fil des âges et d’une filmographie parfaite comme un véritable génie de l’animation, un Walt Disney japonais (mais attention à la comparaison qui pourrait paraître insultante) à l’imagination débordante, au crayon particulièrement bien affûté (des couleurs vives et éclatantes dans ses dessins) et à l’esprit créatif absolument renversant. Loin des CGI et extrêmement fidèle à une technique dite traditionnelle, Hayao Miyazaki peut se vanter de compter parmi les personnalités les plus influentes du monde de l’animation.

 « Le Vent se lève, il faut tenter de vivre » est sa dernière merveille. Un film adulte, triste, bouleversant et particulièrement émouvant, surtout lorsqu’on sait qu’il est l’ultime baroud d’honneur du principal fondateur du studio Ghibli – Hayao Miyazaki ayant publiquement fait ses adieux au monde du cinéma.
 
Projeté dans plusieurs festivals internationaux (la Mostra de Venise, le Festival San Sebastian en Espagne…), le film a également été présenté au public en avant-première lors de la 5ème édition du Festival Lumière à Lyon, avant sa sortie nationale prévue le 22 janvier prochain.
Synopsis Allociné : L’histoire de l’ingénieur japonais Jiro Horikoshi, connu pour avoir créé l’avion de chasse Mitsubishi A6M, surnommé chasseur Zero et devenu le symbole de la lutte aérienne du Japon durant la Seconde Guerre mondiale.
 
Décidément, les « retraites cinématographiques » sont à la mode en ce moment. Après Steven Soderbergh le mois dernier et son dernier film format grand écran (le délicieux « Ma vie avec Liberace »), puis une « annonce » anticipée toute fraîche de Tarantino lors de son passage au Festival Lumière – le metteur en scène au débit verbal mitraillette a en effet évoqué l’éventualité d’un reclassement professionnel prochain vers le milieu de critique cinéma – c’est aujourd’hui avec grande tristesse que l’on apprend le retrait du maître nippon de l’animation en qualité de réalisateur.
 
« Le Vent se lève » est sans doute l’œuvre la plus personnelle de Miyazaki (il paraît évident que le jeune héros est une projection de Miyazaki lui-même … ou de son père qui travaillait dans l’aéronautique) et la plus belle déclaration d’amour de ce dernier à un thème qui lui est cher : l’aviation. Le senseï l’avait déjà prouvé avec « Porco Rosso », il transforme aujourd’hui l’essai en révélant un film historique sombre, davantage destiné aux adultes, retraçant la vie de Jiro Horikoshi, l’un des plus brillants ingénieurs aéronautiques de l’histoire du Japon et célèbre pour avoir mis au point l’avion de chasse – bombardier Zéro, redoutable killer de la Seconde Guerre Mondiale.
« Le Vent se lève » suit donc Jiro de l’enfance à l’adolescence, en passant par sa rencontre avec celle qui deviendra sa femme, au hasard d’un terrible tremblement de terre, ou par ses songes, au cours desquels son mentor, l’ingénieur italien Caproni, lui inculque les rudiments du métier, le guide et l’inspire. La dimension documentaire indissociable du romanesque et de l’onirisme en quelque sorte. Comme si l’animateur Miyazaki ne pouvait totalement délaisser son univers féérique – truffé de créatures magiques, d’inventions mécaniques délirantes, de personnages fantasques – et se devait d’apporter à l’ultra-réalisme de gré une touche (optimiste) de fantaisie réconfortante. Quoique ambivalent le Miyazaki, puisque les rêves du héros sont davantage des cauchemars, remplis de crashs aériens spectaculaires.
« Le Vent se lève » est aussi l’occasion pour le cinéaste de lever le voile sur les tragédies de l’époque (la tuberculose qui décima une partie de la population, les choix douteux du gouvernement durant la Guerre, la crise économique et le chômage qui ponctuèrent la Grande Dépression) et de visiter ses thèmes de prédilection : l’obsession des engins volants donc, mais aussi le psycho-trauma des catastrophes et des échecs (témoin du Japon hanté post-Fukushima?), la beauté des rêves, l’épanouissement des enfants. Plus surprenant est l’étrange passivité de Jiro face aux drames qu’il traverse, à commencer par le destin tragique de sa fiancée.
Visuellement splendide (un authentique tableau de Renoir), « Le Vent se lève » est également superbe grâce à sa musique, concoctée par le fidèle compositeur Joe Hisaishi, qui livre une partition éblouissante, bercée par quelques notes majestueuses de mandolines et d’accordéons.
Bilan : Une dernière prouesse pour Miyazaki, qui sait visiblement s’arrêter à temps. Un peu déconcertant au départ par son approche linéaire et rationnelle, « Le Vent se lève » devient petit à petit objet de tous les fantasmes en sondant la personnalité de son auteur.
Anecdote : La question d’un successeur à la tête du mythique studio Ghibli se pose plus que jamais actuellement. Plusieurs noms ont circulé : Hiroyuki Morita, le réalisateur du décevant « Royaume des chats », Hiromasa Yonebayashi (« Arrietty »), et Goro Miyazaki, fils de Hayao.
 
La Bande Annonce du film Le Vent se lève, il faut tenter de vivre:
 
 
NOTE: 9/10

L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet

Jean-Pierre Jeunet est un auteur à la touche singulière – un univers reconnaissable entre mille – qui n'a jamais égaré son talent à travers le temps, quoiqu’on en dise. Le metteur en scène français à la fibre poétique et au style nostalgique inégalable (l’ambiance de vieille brocante, les personnages fantaisistes, le fidèle Dominique Pinon, les effets visuels inventifs et acidulés, le filtre jaune-vert) fut largement décrié après la sortie du quatrième volet « Alien » alors qu’il insufflait pourtant au mythe une nouvelle vitalité. Le triomphe mondial du « Fabuleux destin d’Amélie Poulain », remède à la mélancolie vendu sans son acolyte Marc Caro, remit rapidement tout le monde d’accord.  
Après le bide – non mérité – de « Micmacs à tire-larigot », comédie burlesque étonnante en forme d’hommage à Méliès, Jean-Pierre Jeunet essuya hélas un nouvel échec avec l’affaire « L'Odyssée de Pi » : Jeunet devait en effet réaliser le film avant que le projet n'échoue finalement entre les mains d’Ang Lee, avec le succès que l'on connaît. Aujourd'hui, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le frenchy digère ces péripéties en sortant son nouveau long métrage, une aventure initiatique au titre à rallonge, « L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet » transposition ciné du roman éponyme – réputé inadaptable – de Reif Larsen.
Synopsis Allociné : T.S. Spivet, vit dans un ranch isolé du Montana avec ses parents, sa sœur Gracie et son frère Layton. Petit garçon surdoué et passionné de science, il a inventé la machine à mouvement perpétuel, ce qui lui vaut de recevoir le très prestigieux pris Baird du Musée Smithsonian de Washington. Sans rien dire à sa famille, il part, seul, chercher sa récompense et traverse les Etats-Unis sur un train de marchandises. Mais personne là-bas n'imagine que l'heureux lauréat n'a que dix ans et qu'il porte un bien lourd secret …
Avec « L’Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet », Jeunet redevient jeune et formidable conteur d’histoires. En narrant les tribulations et pérégrinations du jeune génie T.S. Spivet à travers les Etats-Unis, Jean-Pierre Jeunet retrouve en effet les thèmes qui lui sont chers (l’enfance vulnérable, la désillusion des rêves de gosse, les rencontres éphémères …), tout en proposant parallèlement une escapade très adulte, ponctuée de moments émouvants (la question du deuil y est abordée frontalement mais avec beaucoup de tendresse, la confrontation finale avec la mère est bouleversante) et séquences magnifiques (les paysages du Montana recréés au Canada, lieu de tournage de l’aventure). Comparaison évidente avec « Moonrise Kingdom » de Wes Anderson qui surfait sur la même vague mélancolique. 
Pour représenter l’imaginaire foisonnant de Spivet – des dizaines de schémas tarabiscotés – et entretenir la magie, Jean-Pierre Jeunet s’est entouré de son équipe habituelle (hormis le DP Bruno Delbonnel, remplacé par le tout aussi prodigieux Thomas Hardmeier) et mitraille la rétine du spectateur d’artifices en tout genre, qu’il manie évidemment à la perfection (des collages, des vignettes, des bulles, des filtres, le splendide relief 3D créé lors du tournage à l’aide de la caméra Arriflex Alexa).
Jeunet fait donc preuve d’une mise en scène maîtrisée, mais aussi d’une profondeur et d’une finesse dans la présentation des personnages, toujours très loufoques. Dans la famille Spivet, on a donc droit au frère jumeau intrépide, à la grande sœur promise à une grande carrière de mannequin, à la mère collectionneuse (jouée par une Helena Bonham Carter qu’on n’avait rarement connue aussi naturelle) et au père, un cowboy né un siècle trop tard. Mais ce n’est pas tout, Jeunet expose également toute une galerie de personnages secondaires bien barrés (comme à l’accoutumée), croisés par Spivet au décours de son périple : un routier bienveillant, une directrice de musée futée, des policiers baroudeurs … EXTRAORDINAIRE !
Dommage seulement que le jeune Kyle Catlett, pourtant très pro (on devine qu’il a bûché longtemps pour le rôle), peine à insuffler une âme à Spivet pour toucher l’audience en plein cœur.
Bilan : Extravagant et Prodigieux, « T.S. Spivet » l’est assurément ! Jeunet revient en forme pour son septième long métrage, une traversée émouvante à travers le continent américain. Subtile et drôle, « T.S. Spivet » est aussi l’occasion pour Jeunet de balayer des thèmes plus matures comme la douleur morale liée à la perte d’un être cher. Une franche réussite !
Anecdote : Le roman intéressait depuis quelques années Hollywood et l'auteur Reif Larsen avait établi une liste de 5 réalisateurs potentiels : Alfonso Cuaron, Wes Anderson, Guillermo Del Toro, Tim Burton et Jean-Pierre Jeunet.
 
La Bande Annonce de L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet:
 
 
NOTE: 8/10